Haley était une jeune femme assez sûre d'elle, sans pour autant se montrer prétentieuse. Seulement, la jeune femme savait qu’elle avait pas mal d’atouts : pour commencer, elle était d’une intelligence assez rare – première de sa promotion, et n’était pas non plus désagréable à regarder. Mais souvent, comme ce soir là, Haley s’ennuyait énormément. Il faut dire qu’en cette période de début d’année, il était souvent difficile d’organiser des soirées ou encore de planifier des sorties pour les villages de sorciers alentours. En effet, les élèves étaient encore dans la phase de la rentrée, occupés à mémoriser leurs emplois du temps et souvent tous excités à l’idée d’entamer une nouvelle année. Mais pour la Serdaigle, le début d’année rimait aussi avec la routine qui commençait, inlassablement, à s’installer.

Soucieuse, Haley, assise en tailleur sur son lit, se leva et glissa ses pieds dans des chaussons. Marchant à pas de loup jusqu’à sa valise, la jeune femme attrapa de vielles affaires moldues – un jean et un pull noir – qu’elle enfila en tentant de faire le moins de bruit possible. Fin prête à enfreindre – une fois n’est pas coutume – le règlement de l’école, elle se glissa en dehors du dortoir et descendit les escaliers.
La salle commune des Serdaigles était très lumineuse et très agréable à regarder, avec cette immense vue qui dominait tout le parc de Poudlard. De là ou elle était, elle pouvait voir la forêt interdite, qui ne paraissait vraiment pas accueillante du tout, ainsi que quelques lumières, au loin, qui devaient sans doute appartenir au concierge, qui commençait toujours sa ronde nocturne par le parc, de peur que des élèves ne soient coincés dehors lorsqu’il fermerait les portes. « Tant mieux, songea t’elle, au moins je vais pouvoir sortir sans risque dans le château. ».

Haley franchit la porte qui dissimulait leur salle commune à la vue des autres élèves, et se dirigea vers la volière. C’était vraiment un des endroits favoris de la jeune femme, et pas seulement à cause de la magnifique vue que la tour offrait. Pas parce que l’on s’y sentait libre, en tête à tête avec les étoiles, le vide en dessous de nos pieds. Non, c’était l’endroit favori de la jeune femme grâce aux hiboux. Pas seulement parc que ces animaux étaient vraiment épatants. Non, Haley les adorait car ils lui rappelaient le jour où elle avait reçu sa première lettre pour Poudlard, le jour où cette grande chouette grise la lui avait déposée dans son assiette – alors qu’elle prenait tranquillement son petit déjeuné à la table familiale – le jour de son onzième anniversaire. Elle se rappelait encore sa joie, la fierté de sa mère, et la surprise de son père qui était peut-être un déçu que sa fille choisisse la magie. Mais c’était tout de même le plus beau jour de sa vie. Alors, souvent, la jeune femme sortait le soir, prenait au passage son petit sac violet comme elle l’avait fait ce soir là, remplis de graines, et aller rendre visite à la grande chouette grise.

Mais ce soir là, quelque chose la troubla. A peine entrée dans la salle qu’elle vit une jeune femme, assise les pieds dans le vide. Un coup d’œil suffit à la jeune femme pour reconnaître la téméraire Gryffondor qu’était June. Elle aimait bien cette jeune femme – audacieuse, pleine de gaité, joyeuse – mais elle trouvait qu’elle était parfois un brin trop téméraire.
S’approchant doucement de la jeune femme pour ne pas l’effrayer, et donc entrainer sa chute – avouez que cela serez quand même gênant ! – elle se positionna assez près d’elle pour qu’elle puisse la voir, sans être trop surprise, et lui dit d’une voix douce.

HALEY. June Harringston, que fais-tu si près de ma salle commune ? As-tu une soudaine envie de liberté ?

Haley adressa un sourire à sa camarade. Décidemment, elle avait déjà l’impression que cette scène s’était déroulé. Oui, peut-être lors de leur première année …

Accoudée contre le mur, Haley regardait elle aussi la lune resplendissante, pendue dans un ciel étoilé à lui couper le souffle. C’était ça qui plaisait le plus à la jeune femme dans le fait d’être à Serdaigle : elle pouvait à sa guise contempler le ciel, de nuit comme de jour. Il était vrai que beaucoup de personnes rêvaient ne serait-ce que de découvrir la salle commune des bleus et argents, afin de voir si ce que ces derniers racontaient était vrai : qu’on avait une incroyable sensation de liberté, perché dans les hauteurs du château.
La jeune femme se détourna pour voir June sourire à sa phrase, ce qui lui tira à elle aussi un petit sourire. Décidément, la Gryffondor était vraiment une personne très sympathique. Haley se promit intérieurement d’essayer de mieux la connaître.

June. N’est-il pas l’heure d’aller au lit chez les Serdaigles ? Il y a cours demain, et les assidus au travail devraient se coucher tôt.

Haley laissa échapper un petit sourire en entendant la douce voix de la jeune femme. Elle le savait, June était une personne très taquine qui avait un bon sens de la répartie. Cela plaisait beaucoup à la Serdaigle, qui aimait parler à des gens intéressants, qui avaient autre chose à raconter que leurs petits traquas quotidien – leur nouvelle robe de sorcier, la couleur de leur nouveau parchemin, leur nouvelle plume n’écrivait pas aussi bien que l’autre … - toutes ces petites choses qui l’énervaient au plus haut point.
Avec précaution, la jeune femme s’assit à côté de June, laissant à son tour ses fines jambes se balancer dans le vide. C’était incroyable, de se dire qu’un petit faux pas et toutes deux basculeraient dans le vide. Mais elles étaient prudentes. Ce n’était pas vraiment une nuit propice aux accidents : c’était bien trop beau.

Haley. Les assidus au travail comme moi n’ont pas besoin de beaucoup de sommeil : ils se sont endurcis à travailler tard le soir. Il est encore tôt pour moi, tu sais.

Lui adressant une petite grimace, la jeune femme passa sa main dans ses longs cheveux châtains, les ramena sur son épaule et les tressa négligemment, comme elle le faisait toujours lorsqu’elle réfléchissait. Haley avait une incroyable impression de déjà vu, aussi fouillait t’elle dans ses souvenirs pour tenter de se remémorer ses dernières conversations avec June, qui devaient se compter sur les doigts de la main. Il y avait beaucoup d’élèves à Poudlard, aussi était-il courant de ne pas toujours se croiser. Et puis, les deux jeunes femmes n’étaient pas vraiment des amies intimes. Après un long silence, un de ceux que l’on apprécie, que l’on laisse couler longtemps autour de nous, Haley mit enfin le doigt sur le souvenir qu’elle cherchait.

FLASBACK

La petite fille tenait maladroitement son balai entre ses mains, et montait d’un air décidé les marches pour accéder à la tour d’astronomie. Il faisait nuit noire, et elle espérait ne rencontrer personne près de la volière. Elle aurait eu beaucoup de mal à expliquer que, depuis son premier cours de vol, l’année dernière, elle rêvait de se lancer depuis la plus haute tour du château pour aller voler en pleine nuit dans le parc de Poudlard. Surtout qu’elle était normalement réputée pour être une jeune fille sage et docile, qui n’enfreint jamais le règlement. Essoufflée – ce balai était décidément bien lourd – la petite Serdaigle arriva enfin à son but.

Elle se frotta les yeux à plusieurs reprises. Non, elle ne rêvait pas, elle n’était pas du tout seule dans la tour. Une Gryffondor – il n’y avait qu’eux pour avoir la même idée qu’elle - était aussi près de la fenêtre, à attendre de faire le grand saut avec son balai.
Haley s’approcha de l’autre petite fille, qui semblait elle aussi avoir un air décidé.
Sans un mot, toutes deux enfourchèrent leurs balais, prirent une grande inspiration, et s’élancèrent par la fenêtre. La sensation était vraiment enivrante. Elles volèrent quelques heures, puis retournèrent à la tour d’astronomie.
Assises côte à côte, les joues rosies par le froid, June demanda à la Serdaigle comment elle allait.

FIN DU FLASBACK

June. Comment vas-tu ?

Haley rit aux éclats, tant la similitude avec son souvenir était grande. June, cinq ans plus tard, lui posant la même question que lors de leur deuxième année. Joueuse, la jeune femme décida de lui répondre ce qu’elle lui avait répondu des années auparavant, espérant raviver la mémoire de la rouge et or.

Haley. On ne peut mieux.